Initiatives démocratiques Savoie est le fruit d'une rencontre entre des citoyens, des régionalistes, des fédéralistes, des écologistes et des personnes surtout qui veulent faire avancer la Savoie, des personnes qui veulent lui redonner sa place dans l'Europe.
Faire avancer la Savoie, c'est d'abord la comprendre ; comprendre sa géographie, son économie, sa culture ; mais aussi comprendre les mutations en cours de manière à anticiper les enjeux de l'avenir.
Avant toute chose, il est important de se pencher sur l'histoire de Savoie. Connaître notre passé nous permet de comprendre le présent et d'appréhender l'avenir.
1- l'histoire de Savoie
La Savoie a été avant tout une construction de la Maison de Savoie qui commence en l'an 1000. Comprendre comment celle-ci s'est installée sur ce territoire c'est savoir quelles ont été les facteurs qui vont créer cette entité territoriale.
Avant la Maison de Savoie, sur le même territoire, nous avons un royaume, le royaume de Bourgogne. Celui-ci est cohérent géographiquement, économiquement et spirituellement car il est axé sur la vallée du Rhône, de la Suisse Romande à la mer. Ce royaume n'a pas grand chose à voir avec la Bourgogne actuelle. Ses grandes villes sont Lyon, Vienne, Arles et Lausanne. Le nom de Bourgogne vient des Burgondes qui se sont installés en « Sapaudia » (la futur Savoie) en 443.
Ce royaume va être légué par le roi Rodolphe III à l'Empereur du Saint Empire Romain Germanique Conrad II en 1032. Humbert au blanche main, le premier ancêtre connu de la Maison de Savoie, va aider l'Empereur à récupérer son héritage et recevoir en contrepartie la Maurienne.
La Maison de Savoie va petit à petit former une principauté sur un royaume de Bourgogne qui se morcelle. Les deux raisons principales qui sont à l'origine de cette émergence, c'est tout d'abord le changement des voies commerciales, puis l'effondrement de la puissance du Saint Empire romain germanique.
Les voies commerciales qui suivaient la voie fluviale rhodanienne Nord Sud pendant le haut moyen-âge disparaissent au profit d'un trafic(Sud) Est- (Nord) Ouest par les Alpes pendant le bas moyen-âge. C'est l'émergence de Venise et de Gênes qui contrôlent le commerce méditerranéen.
le royaume de Bourgogne en l'an mil
La Maison de Savoie se posera donc en « Portier des Alpes » substituant les faibles revenus d'une agriculture pauvre et difficile de montagne par les revenus de la route.
A la fin du XIV e siècle, une conjoncture de divers facteurs, va déplacer les grandes foires européennes de Champagne et de Châlon-sur-Saône vers Genève. Ces grandes foires de Genève seront un des plus grand rendez vous commerciale et financier d'Europe. Ce n'est donc pas un hasard si cette période est celle où la Savoie connait sa plus grande apogée. En effet, le souverain de Savoie, Amédée VIII, réalise une grande expansion territoriale et est élevé au rang de duc par l'Empereur Sigismond en 1416.
Maintenant jetons un coup d'œil sur l'importance commerciale et géographique de Genève. Cette ville est à un carrefour de l'Europe. Par la Cluse de Nantua et Bourg en Bresse, elle était reliée au royaume de France. Le Sillon Alpin, Rumilly, Seyssel ou Chambéry permettait de rejoindre la basse vallée du Rhône et notamment Arles, Avignon et Marseille. Du plateau Suisse, deux routes étaient possibles : Celle du Rhin qui menait à Francfort, Cologne puis Bruges et Anvers et celle de l'Allemagne du Sud avec les villes commerçantes de Bavière et de Franconie comme Augsbourg, Ulm, Nördlingen, Munich, Nuremberg puis Prague, Cracovie ou Vienne. Par Annecy, le Petit Saint Bernard et par le Grand Saint Bernard, les marchands venaient de Gênes, Venise, Bologne, Florence et Milan.
Duché de Savoie après 1427.
Genève est une ville qui va passer de 2000 habitants en 1370 à 10 000 habitants en 1450. Et cela dans un contexte européen de crise démographique majeur. Ce fait montre la prospérité de la ville. Chambéry, la capitale de la Savoie, passe pendant la même période, de 6000 à 3500 habitants.
Le déclin des foires de Genève, concurrencée par celle de Lyon, mais surtout concurrencée par la modification des courants économiques qui font suite aux grandes découvertes, ne sera pas pour rien dans la crise que traverse la Savoie à la fin du XV e siècle et au XVI e siècle et au déplacement de son centre de gravité vers Turin.
Une des conséquence de cette crise est que Genève, de ville ouverte, est devenu une ville fermée, la citadelle du calvinisme. Coïncidence ? Calvin prend le contrôle total de la ville en 1555, année de la disparition des grandes foires de Genève. Cette fermeture s'est concrétisé matériellement par la construction de puissantes murailles autour de la ville, objet de tous les soins par les autorités de la république de Genève. Celle-ci, disparaitront seulement au XIX e siècle sous l'impulsion du radical (socialiste) James Fazy qui souhaite ouvrir de nouveau cette ville.
L'ouverture de Genève va se poursuivre au XX e siècle grâce tout d'abord à son aéroport qui permet à des institutions comme l'ONU de se fixer dans cette ville, facile d'accès. La Suisse va être aussi moteur dans la création de l'AELE (Association Européenne de Libre Échange) en 1960 organisation créée pour concurrencer l'ancêtre de l'Union Européenne, la CEE. Genève abritera d'ailleurs le secrétariat de cette organisation.
Si l'AELE et la CEE sont à l'origine de poids égales, le basculement de la grande Bretagne suivi du Danemark en 1973 donnera un net avantage à la CEE et entrainera à sa suite le Portugal. Dans les années 90 est proposé une structure permettant progressivement d'inclure les derniers membres de l'AELE : l'EEE. La Finland, la Suède et l'Autriche eux, entrant directement dans l'Union Européenne.
La tour de l'île est le seul vestige subsistant du château des comtes de Savoie à Genève
Mais en 1992, la Suisse refuse son intégration dans l'EEE (Espace Economique Européen), sorte de superstructure permettant à l'AELE faire partie de l'Union européenne. La Suisse sera malheureusement le seul pays de l'AELE a refuser cette intégration. Ce refus est dû essentiellement aux cantons alémaniques qui ont voté à 70% contre, alors que la Suisse romande votait à 80% pour l'intégration à l'Union européenne. Les votations suivantes continueront de montrer un clivage important entre les cantons alémaniques et les cantons francophones concernant les rapports avec l'Union Européenne.
Cependant, cette intégration se fera quand même grâce à des accord bilatéraux qui permettent à la Suisse de rentrer dans l'espace Schengen. Cela permettra de faciliter les échanges et notamment soit le travail, soit la résidence dans le pays voisin. De ce fait, Genève se métropolise. On parle alors d'Agglomération Franco-Valdo-Genevoise, puis de Grand Genève. Certain vont même jusqu'à anticiper une grande région comprenant la Savoie, L'Ain, Genève et le canton de Vaud comme l'ancien maire de Genève, le radical (Socialiste) Claude Haegi.
En effet, la fin du XX e siècle va de nouveau faire découvrir à la Savoie, son histoire, et qu'elle est au cœur de l'Europe, liée de très près à Genève et au pays de Vaud. Cette ouverture va lui donner une nouvelle dynamique économique.
Cependant, malgré cette dynamique économique, le chemin vers l'ouverture institutionnel et le rapprochement semblent bouché. Les différents référendums en Suisse bloquent chaque avancée vers une ouverture et contraigne même au rétablissement d'une frontière étanche. En France aussi, le souverainisme gagne du terrain au détriment d'une ouverture sur l'Europe et un fédéralisme salutaire.
Cependant, seule une autonomie régionale liée à fédéralisme au niveau européen et à un rapprochement avec la Romandie permettront de grandes avancées
Le château de Chillon dans le pays de Vaud est le château savoyard le mieux préservé
2e partie : économie et voie de communication
Grand Genève : Le grand Genève, malgré ses détracteurs devient de plus en plus une réalité économique et sociale. C'est avant tout, le pivot de deux conurbations : celle de Lausanne-Genève et celle du Sillon Alpin. C'est aussi la jonction avec une voie Est-Ouest matérialisée par l'autoroute blanche de Bourg en Bresse au Val d' Aoste via Bellegarde, Saint Julien, Annemasse et le Faucigny. C'est pourquoi la partie française, loin d'être une banlieue de Genève est aussi un de ses nouveau centre à prendre en compte.
La construction du CEVA est une avancée nécessaire et doublement intéressante à la fois pour relier ce nouveau centre mais aussi pour palier au manque d'infrastructure sur ce lieu. Le Ceva se doit d'être prolongé jusqu'au moins Bonneville par un tram-train afin de relier de manière directe la vallée du Faucigny avec Genève, mais aussi proposer une alternative au tout voiture. Réhabiliter la voie ferrée et proposer un accès plus direct vers Genève aux habitants d'Annecy et Rumilly par des intercités réguliers.
Une deuxième jonction entre le sillon alpin et une voie Est-Ouest mérite d'être évoquée, c'est celle qui passe par Chambéry et qui relie Lyon à Turin, matérialisée à la fois par l'autoroute, mais aussi par la voie ferrée existante. La traversée routière des Alpes est devenu problématique à cause de l'augmentation de la pollution. Un transfert modal de la route vers le rail sur la ligne existante est possible.
L'autre infrastructure importante est l'aéroport de Genève. C'est à la fois un outil essentiel pour la communication pour tout l'espace des Savoie du Bugey, du pays de Gex et du pays de Vaud, mais aussi l'objet de gros problèmes puisqu'il est saturé, avec une quasi impossibilité d'extension et qu'il cause une énorme pollution. Le développement du Low cost et l'installation de la compagnie Easyjet qui en a fait un de ses principaux hub a aggravé ces problèmes.
Au niveau bancaire, le Brexit avait ouvert une formidable opportunité pour Genève de remplacer la City de Londres. Malheureusement Genève ne fait pas partie de l'Europe et le marché de la City sera finalement partagé entre Paris et Francfort. L'adhésion à L'union Européenne permettrait d'en avoir au moins une partie, ce qui n'est pas négligeable dans un contexte où les paradis fiscaux sont de moins en moins acceptés par l'opinion.
Cette inquiétude sur le secteur bancaire est justifié. C'est grâce à lui, indirectement il est vrai, que 100 000 frontaliers peuvent travailler à Genève et dans le pays de Vaud rapportant l'équivalent du revenu de 500 000 personnes entre l'Ain et la Savoie
réseaux autoroutiers et conurbations
Tourisme : Le tourisme est un secteur emblématique de la Savoie. C' est une des plus grande industrie des deux départements de Savoie et de Haute Savoie notamment l'industrie des stations de ski. Cependant celui-ci est exposé au réchauffement climatique. De plus, il ne propose pas un modèle écologique viable.
L'industrie de la neige ne profite que partiellement aux populations locales. L'activité immobilière qui en découle génère une surconsommation foncière, une faible rentabilité par nombre de lits (contrairement au modèle autrichien) et une pénurie du logement pour les habitants permanents.
Il est donc nécessaire d'anticiper un changement important et de se reporter vers un tourisme doux incluant notre patrimoine naturel et historique. Faciliter notamment la venue des touristes Suisses vers les villes et villages de Savoie et de l'Ain. Donner envie de les découvrir. Mais aussi permettre aux habitants de l'Ain et de la Savoie de profiter de la richesse de l'offre culturelle genevoise et vaudoise. Faciliter l'accès des savoyards français vers les expositions et manifestations culturelle, mais aussi vers les musées genevois pour approfondir notre culture commune : Le peintre Konrad Witz, dont le tableau "la pêche miraculeuse" est exposé au musée d'Art et d'histoire de Genève, est celui qui représente le mieux cette culture commune liée à l'espace européen.
Konrad Witz est un peintre emlématique de l'histoire de l'art puisqu'il représente la transition entre le gothique et la renaissance, la transition entre le moyen-âge et l'époque moderne. Son tableau, "La pêche miraculeuse" est le premier tableau de l'histoire à représenter un décors réel. Ce décor est un paysage familier de Savoie, puisque c'est celui de la rade de Genève avec en arrière plan les sommet du Genevois et du Faucigny.
Le style Gothique international convient bien pour un peintre comme Konrad Witz qui est né en Souabe (à Rothweil) et a fait sa carrière à Bâle et en Savoie. En effet, il avait été attiré par le concile qui se déroulait à Bales et qui promettait alors des embauches dans le domaine de l'art. C'est devenu ensuite un des peintre d'Amédée VIII et son tableau, "la pêche miraculeuse" faisait partie d'un ensemble qui formait un retable qui était exposé au chœur de la cathédrale de Genève. L'ensemble des tableaux formait un outil de la promotion pour la bonne gestion de la ville de Genève par le duc de Savoie.
La pêche miraculeuse de Konrad Witz
Agriculture : L'agriculture est très liée au tourisme. C'est un des axes majeurs pour la préservation des paysages et des protection contre les risques d'éboulements et d'avalanches. Le déclin de l'agriculture en montagne a tendance à transformer les prairies et les champs en forêts uniformes. Si c'est une perte pour la biodiversité, c'est aussi une perte pour nos paysages qui perdent des teintes verts clairs et deviennent austères. Cela aussi rend fragile les sols et cela à un coût plus important pour la collectivité. C'est pourquoi il est nécessaire de revaloriser cette agriculture. Cela passe par un soutien fort vers le développement du 2nd pilier de la PAC et à un renouvellement des dispositifs Leader et Feder.
Les reliefs cependant obligent la Savoie à ne pas avoir une grosse agriculture productiviste. Nos atouts sont de bénéficier d'un nombre important de micro-climats (nous connaissons le climat méditerranéen de Brison Saint Innocent mais beaucoup moins celui de Saint Michel de Maurienne où les amandiers peuvent pousser). Nous pouvons donc développer toute une gamme de produits à forte valeurs ajouter qui compensent un cout d'investissement important d'aménagement des parcelles dû au relief.
Décolletage et industrie : Notre industrie perdure car notre culture propre est basée sur des savoir-faire techniques et sur une agilité liée à un esprit plus germanique et déconcentré que dans le reste de la France. «Savoyen ist eine gescheiterte Schweiz» («La Savoie est une Suisse qui n'a pas réussi»).
La force de nos PME est de s'adapter au marché. La situation de la Savoie, au cœur de l'Europe, permet une facilité d'échange et augmente de ce fait les part de marché de nos PME. Ce qui les rend plus compétitives.
L'objectif est aussi de prendre le virage du recyclable et de l'économie circulaire plus économe en énergie et en matière première. De créer une industrie et des modes de consommation plus vertueux et plus respectueux de notre environnement.
Énergie : La Savoie a été longtemps leader dans les énergies renouvelables : Il suffit d'évoquer les grands barrages des Alpes, mais aussi la centrale électrique solaire des Monts au dessus de Chambéry a été longtemps la plus grande centrale solaire de France. L'INES (Institut National de l'énergie Solaire) est elle, située à Technolac au Bourget du Lac. Là aussi, il est encore indispensable d'évoquer nos voisins d'Allemagne et d'Italie qui ont arrêté l'énergie nucléaire et sont donc des pays en recherche de solutions pour les énergies renouvelables. Donc un immense marché potentiel sans compter la Suisse qui devrait les suivre.
Il est incroyable de penser que un des fleurons de la France dans les énergies renouvelables, CLIPSOL est entrain de fermer . Cette entreprise suit le même sort que Photowatt située en Isère, pas loin de la Savoie. C'est donc toute une filière qui se trouve curieusement en difficulté paradoxalement dans un contexte favorable au niveau mondial pour les énergies renouvelables. Cette filière semble faire les frais d'une politique nationale du tout nucléaire.
Nous pouvons aussi évoquer l'énergie bois dans le développement des énergies renouvelable en lien avec la gestion de nos forêts.
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Conclusion : La Savoie, est une entité territoriale en construction. C'est à la fois un bassin de vie mais aussi un territoire à la croisée de plusieurs axes de circulation. Sa position sur les frontières des états nations et au centre de l'Europe est un atout économique mais fonde aussi sa particularité culturelle.
Tout cela amène aussi à une réflexion sur les politiques publiques en Savoie : celles-ci sont extraordinairement sous dimensionnées, par rapport à l'activité de ce territoire : pas de région administrative, pas d'académie,....
De plus, la difficulté de circulation dû au relief entrainent des besoins spécifiques de services de proximité certe onéreux, mais nécessaire au maintien du tissu social dans les vallées.
Nous soulignons en outre la difficulté de gérer le grand Genève, zone métropolitaine qui se trouve coupée dans deux pays dont un ne fait même pas partie de l'Union Européenne. La réflexion de l'ancien maire de Genève Claude Haegi qui avait évoqué la création d'une entité territoriale régionale transfrontalière sur la Savoie, l'Ain et le Léman mériterait d'être, de ce fait, approfondie.